L’Évangile accuse

Chers amis, quelles sont à vos yeux la signification et la portée de l’Évangile ? Entendons par l’Évangile la totalité de la révélation du Christ, c’est-à-dire le Nouveau Testament. Quelle impression la lecture de la Bible laisse-t-elle en vous ?

Cette question exigerait sans doute de votre part une réponse développée – car vous pourriez parler de la majesté des Écritures, et peut-être, pour me faire plaisir, vous étendriez-vous sur l’amour de Dieu, sa grande justice et sa miséricorde.

Toutes ces remarques seraient très vraies ; cependant, elles ne résumeraient pas toutes les caractéristiques de l’Évangile ou du moins ses caractéristiques majeures. En réalité, si ces remarques en restaient là, nous n’aurions de l’Évangile qu’une image incomplète et dangereusement fausse.

Ces paroles sembleront sévères et exagérées. Vous verrez qu’elles sont parfaitement justifiées. En général, l’image populaire que l’on se fait du Christ est celle d’un personnage quasi légendaire, doux, miséricordieux, perpétuellement cloué sur la croix. Un Christ tellement pacifique, qu’on le dirait sans volonté, incapable de se montrer sévère et exigeant. Pourtant, pour qui connaît l’Évangile même superficiellement, c’est la ferme autorité du Christ qui frappe d’abord. On le découvre intransigeant à l’égard de l’obéissance aux commandements de Dieu et terriblement sévère à l’égard de toute forme d’injustice, d’hypocrisie et de péché en général.

Dans les premiers chapitres de l’Évangile selon Matthieu, il est dit que…

« la foule était frappée de sa doctrine ; car il enseignait avec autorité et non pas comme leurs scribes. » (Matthieu 7.28-29)

On l’entend déclarer :

« Celui qui me rejette et qui ne reçoit pas mes paroles a son juge ; la parole que j’ai annoncée, c’est elle qui le jugera au dernier jour. » (Jean 12.48)

Il qualifie d’insensé l’homme qui ne bâtit pas sa vie sur le roc de sa Parole. Il prédit que tout édifice spirituel construit sur une autre fondation que lui-même est voué à la ruine.

La bonté et la justice

Ce sont là déclarations qui font réfléchir ; elles contraignent bon gré mal gré à l’action, à une prise de position… soit POUR, soit CONTRE. Elles révèlent que si la bonté est une des caractéristiques de la divinité, la justice en est une autre. Et la justice suppose la sévérité envers le mal et la récompense du bien.

Nous avons, en effet, tendance à hypertrophier la bonté, la miséricorde et la patience de Dieu. C’est-à-dire que nous nous en servons à l’infini comme d’une sorte de protection. En cela, nous devons nous rendre compte que nous nous trompons nous-mêmes par ces vains raisonnements. Nous avons travesti le Dieu de la Bible en un bon père tranquille, tellement patient, tellement indulgent, qu’il en est faible !

Il faut restituer à l’Évangile sa véritable caractéristique qui est sa RAISON D’ÊTRE. Tout en étant la révélation de la divinité miséricordieuse, l’Évangile est aussi la révélation de nos péchés, de notre misère, de notre enchaînement funeste au matérialiste.

Si nous n’avons pas compris cela, nous n’avons rien compris à l’Évangile. Lorsque nous nous imaginons que l’Évangile est pour les autres, pour ceux qui sont vraiment méchants, vraiment mauvais, nous faisons dangereusement fausse route.

L’Évangile parle à chacun

Car… avant d’être la révélation faite au monde en général, l’Évangile parle d’abord à chacun de nous en particulier, c’est-à-dire à vous, cher ami, à moi, à chaque homme en tant qu’individu.

Avec l’Évangile, nous sommes tous sur le banc des accusés. C’est ce qu’entreprend de démontrer l’apôtre Paul dans sa lettre aux Romains (chapitre 3) où il déclare que tous les hommes, sans exception, sont sous l’empire du péché. Il cite les Psaumes pour appuyer sa démonstration :

« Il n’y a point de juste, pas même un seul ; nul n’est intelligent, nul ne cherche Dieu ; tous sont égarés ; tous sont pervertis ; il n’en est aucun qui fasse le bien, pas même un seul ; leur gosier est un sépulcre ouvert ; ils se servent de leurs langues pour tromper ; ils ont sous leurs lèvres un venin d’aspic ; leur bouche est pleine de malédiction et d’amertume. » (Romains 3.11-18)

Il est clair que, dans ce réquisitoire implacable, l’apôtre essaie d’établir une fois pour toutes la culpabilité foncière de tout homme devant Dieu – d’où sa condamnation.

Mais en quoi suis-je coupable ?

À ce point nous sommes enclins à demander : « Mais en quoi suis-je coupable ? Qu’ai-je fait ? Qu’ai-je dit ? – à part quelques petites entorses à certains principes – mais rien qui puisse justifier ma condamnation. »

C’est dans ce raisonnement que se trouve la racine du cancer spirituel qui ronge les hommes. Ils sont indifférents. Ils ne pensent jamais à Dieu. Ils sont égoïstes. Ils ne pensent qu’à eux-mêmes, à leurs biens, à leurs espérances de gains. Ils sont matérialistes et sensuels… et ils se demandent en quoi ils sont coupables ! Ce sont là les trois maux dont souffrait le fils prodigue de la parabole : indifférence envers les sentiments de son père, égoïsme et sensualité (Luc 15.11-24).

Dans de telles conditions, l’homme s’est attiré la colère de Dieu. Car non seulement il renie celui qui est le Chemin, la Vérité et la Vie (Jean 14.6), mais il s’est fabriqué une religion personnelle, bien confortable parce qu’elle ne lui coûte rien et qu’elle n’exige rien.

Les mêmes caractéristiques jalonnent l’Ancien Testament. Dieu laisse éclater sa colère contre un peuple ingrat, indiscipliné et inconstant. Mais dans quel sens est-il tout cela ?

Le prophète Jérémie le précise : Parce qu’ils n’ont pas marché dans les voies que Dieu avait prescrites. Parce qu’ils n’ont pas pris garde à ses avertissements, tout en lui offrant un culte par habitude sans ferveur ni sincérité.

N’est-ce pas là une image terriblement vraie de notre siècle où la religion est généralement réduite à des rites extérieurs qui frappent les sens plutôt que l’âme et le cœur ?

Que dit Dieu de tout cela ? On peut s’en douter avant même de le lire :

« Qu’ai-je besoin de l’encens de vos holocaustes et vos sacrifices ? » (Jérémie 6.16-20)

« L’observation de sa parole vaut mieux que tous les sacrifices, car la désobéissance est aussi coupable que la divination et l’idolâtrie. » (1 Samuel 15.22,23)

À ce point, nous pouvons faire intervenir un verset qui résume à lui seul toute l’histoire de la révélation. Il s’agit de la lettre de Paul aux Romains, chapitre 3, versets 23 et 24.

Tous ont péché

« Car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu. Ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ. » C’est ici qu’intervient la grande bonté de Dieu en ce qu’il a décidé de nous accorder sa grâce, alors que nous étions manifestement coupables – coupables et, qui plus est, incapables de nous racheter nous-mêmes.

« Car lorsque nous étions encore sans force, Christ, au temps marqué, est mort pour des impies. À peine mourrait-on pour un juste ; quelqu’un peut-être mourrait-il pour un homme de bien. Mais Dieu prouve son amour envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous. À plus forte raison donc, maintenant que nous sommes justifiés par son sang, serons-nous sauvés par lui de la colère. » (Romains 5.6-9)

La folie de l’homme

Tous ces passages font transparaître la folie de l’homme qui ambitionne de se présenter devant Dieu avec le bilan de sa pauvre vie. « Me voici, Seigneur. Je n’ai jamais tué, jamais volé. Je n’ai jamais compté sur personne, et maintenant je compte sur toi pour reconnaître ma justice, ma moralité et pour fermer les yeux sur mes petits défauts. »

Qu’un tel homme ne s’imagine pas qu’avec un orgueil aussi démesuré, il entendra des paroles de bienvenue de la part de celui dont le Fils unique fut cloué sur une croix par les péchés de tous les hommes.

L’Évangile nous apprend au contraire que nous ne pouvons nous approcher de Dieu que par la foi en Jésus-Christ. La Bible nous le dépeint comme un médiateur et comme un avocat… mieux encore, comme une rançon. C’est par le sacrifice de sa vie qu’il a satisfait à la justice divine, laquelle exigeait la punition des coupables. C’est lui qui jusqu’au bout demeure notre sagesse, notre justice, notre sanctification, si jusqu’au bout, nous lui conservons notre foi (1 Corinthiens 1.30).

Le but de l’Évangile, déclare l’apôtre, c’est de « présenter à Dieu tout homme devenu parfait en Christ » (Colossiens 1.28).

S’adressant aux chrétiens, il écrit :

« Et vous, qui étiez autrefois étrangers et ennemis par vos pensées et par vos mauvaises œuvres, il vous a maintenant réconciliés par sa mort dans le corps de sa chair, pour vous faire paraître devant lui, saints, irrépréhensibles et sans reproche, si du moins vous demeurez fondés et inébranlables dans la foi. » (Colossiens 1.21,22)

Identification de christ avec nous

Il y a là une sorte d’identification de Christ avec nous et une identification de nous-mêmes avec le Christ – par la foi, la repentance et le baptême. Dans le langage de la Bible, le baptême est l’acte de foi par lequel nous nous unissons au Christ dans sa mort et dans sa résurrection. L’apôtre Paul dit que nous devenons ainsi une même plante avec lui (Romains 6.3-5).

Si ce vocabulaire est un peu spécial d prime abord, il laisse toutefois entendre que le baptême a, dans la pensée des apôtres, une importance et une portée plus grande que celle que nous lui prêtons habituellement. Sinon, pourquoi les apôtres auraient-ils jamais ordonné à leurs auditeurs :

« Repentez-vous et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, pour le pardon de vos péchés » ? (Actes 2.38, Colossiens 2.12)

C’est que le baptême est un acte de foi et d’obéissance – le premier sans doute – qui nous plonge au cœur du salut. Et on ne peut concevoir de salut sans rémission des péchés.

Jésus est donc l’auteur d’un salut éternel « pour ceux qui lui obéissent » (Hébreux 5.9). C’est lui qui a dit : « Si vous m’aimez vous garderez mes commandements » (Jean 14.15).