Le Dieu de la création et de la révélation

Table des matières


Chapitre 6
La Bible et l’archéologie

« Ézéchias fit ce qui plaît au Seigneur, tout comme son ancêtre David. »
2 Rois 18.3

« Sur le mont Ébal, Josué fit un autel pour le Seigneur Dieu d’Israël.
Il le construisit selon les instructions que Moïse le serviteur du Seigneur avait données aux Israélites… un autel en pierres brutes, non taillées avec un outil de fer. »

Josué 8.30, 31

L’archéologie est une science des choses anciennes. Elle est une source de vérification et d’information qui confirme l’authenticité et l’historicité de la Bible. L’archéologie biblique s’efforce de comprendre l’histoire, la vie, les coutumes des Israélites et des autres peuples avec qui ils furent en contact. Parmi ces peuples, ceux qui nous ont fourni le plus de renseignements sont l’Égypte, Moab, Édom, Ammon, la Syrie, Canaan, l’Assyrie, Babylone, la Perse, la Grèce, le monde romain.

Les sources d’information de l’archéologie biblique sont principalement :

  1. Les documents écrits (sur du métal, de la pierre, du papyrus, du parchemin, du bois, etc.).
  2. Les constructions et monuments ainsi que les objets.

Dans cette dernière catégorie, on classe les anciennes villes qui ont été enfouies et sur lesquelles on a reconstruit d’autres villes (Béthel, Jéricho, Aï, Samarie, Jérusalem, Megiddo, Debir, Hatsor, etc.). Les tombes sont aussi une source d’information (les tombes royales d’Our en Chaldée ; la tombe du pharaon Toutankhamon, etc.). Les objets que l’on trouve dans les tombes sont généralement mieux conservés.

Dans la mesure du possible l’archéologie s’efforce de comparer les différentes découvertes. Les archéologues tiennent compte aussi de certains documents écrits (comme par exemple la Bible) qui leur indiquent où il faut faire les recherches.

Pour les recherches on doit obtenir l’autorisation du gouvernement intéressé, et il faut louer ou acheter le terrain où l’on désire faire les fouilles. On divise la surface à fouiller en petits carrés de quelques mètres de côté. On procède ainsi d’une façon systématique aux fouilles. On répartit les découvertes selon la profondeur où elles ont été faites. Dans un tell les découvertes les plus profondes sont les découvertes les plus anciennes. Les archéologues font aussi des photographies et des plans.

L’archéologie biblique est une science relativement récente. Avant le début du 19e siècle, on savait très peu de choses sur les temps bibliques (exception faite de ce qu’on pouvait lire dans les Écritures). C’est Napoléon qui commença à provoquer l’intérêt dans l’archéologie lorsqu’il fit ses expéditions dans la vallée du Nil (1798). L’archéologie permet d’illustrer et de confirmer l’histoire biblique.

Les trésors d’Assyrie et de Babylone ne furent mis en lumière qu’à partir de la seconde moitié du 19e siècle (Paul-Émile Botta ; Henry Layard ; H. C. Rawlinson, etc.). Les documents égyptiens et babyloniens purent être déchiffrés grâce à la découverte de la Pierre de Rosette (qui permit, en outre, de comprendre les hiéroglyphes) et de la Behistun (qui permit de comprendre l’écriture cunéiforme) ; la découverte en 1868 de la pierre moabite provoqua une grande sensation.

Parmi les découvertes les plus étonnantes on peut nommer le Code d’Hammourabi (1901), le papyrus d’Éléphantine (1903), les monuments de Bog-Haz-Koi (1906), les textes de Ras Shamra (1929-1937) et les manuscrits de la mer Morte (1947).

L’archéologie a montré que les descriptions d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ainsi que leur manière de vivre sont authentiques ; que Moïse avait le choix entre plusieurs langues : les hiéroglyphes, l’akkadien (les textes de Tell Asmara datent du 14e siècle av. J.-C.), l’hébreu ancien (découvertes de Ras Shamra et de la littérature Ougarit, 1929-1937).

Certains lieux ne sont mentionnés que dans les Écritures. L’archéologie a permis de les mettre à jour : Silo, Guéba, Megiddo, Samarie, etc. Des individus que seule la Bible mentionnait ont été authentifiés par l’archéologie (notamment Belschatsar, Dan. 5). On pensait que Belschatsar n’avait jamais existé et que ce nom était une pure invention des Écritures. On pensait cela car l’histoire ne révélait aucun roi babylonien de ce nom. Les chroniques de Nabonide montrent que Nabonide (roi de Babylone) partit de Babylone aux environs de 556 av. J.-C. et qu’il confia le trône à Belschatsar, son fils. Ce fut pendant cette absence de Nabonide que les Mèdes et les Perses attaquèrent Babylone (Dan. 5). Ésaïe 20.1 mentionne un certain Sargon, mais aucun autre document en dehors de la Bible ne mentionnait ce nom. En 1843 P.-É. Botta découvrit le palais de Sargon. En fait, le roi Sargon (722-705 av. J.-C.) est le roi assyrien sur lequel on a le plus d’informations. On a aussi découvert environ 300 tablettes datant du temps de Nebucadnetsar (595-570 av. J.-C.). Sur ces tablettes on peut lire le nom du roi Jojakin (voir 2 Rois 25.27-30).

L’archéologie a changé le visage de la critique biblique. Même H. H. Rowley, un érudit libéral, avoue que l’archéologie a forcé la critique biblique à adopter des opinions plus conservatrices sur les Écritures.1H. H. Rowley, The Old Testament and Modern Study, Oxford Univers. Press. 1967 p. XVII Dans ce chapitre nous nous limitons aux découvertes qui se rapportent à l’histoire décrite dans l’Ancien Testament (avant la naissance de Jésus-Christ).

L’archéologie et l’Ancien Testament

Les anciennes civilisations

L’archéologie montre que les activités les plus primitives ont été l’agriculture et l’élevage (Gen. 4.2). Puis on trouve les débuts de la vie urbaine et le développement de l’artisanat (Gen. 4.16-24). Les découvertes archéologiques ont montré les nombreux aspects de la vie primitive telle que nous la trouvons dans les Écritures. C’est notamment le cas de Tell Hassuna (près de Mossoul), et de Ninive (Tepe Gauvra). Ces fouilles ont montré qu’un haut degré de civilisation existait déjà 5000 ans av. J.-C. Les excavations de Tell Asmar montrent que les hommes connaissaient et utilisaient le fer vers 2700 av. J.-C. (voir « Oriental Institute » Com. XVII, p. 59-61).

Les récits du déluge

Les peuples de qui descendent les Hébreux ont conservé un souvenir assez précis du déluge. Cela est évident à Akkad et Sumer où l’on a retrouvé des tablettes cunéiformes relatant le déluge. La liste la plus ancienne des rois sumériens mentionne huit rois qui régnèrent avant le déluge (le prisme de Weld-Blundell). Cette liste de rois sumériens est interrompue à cause du déluge.

Le récit sumérien du déluge est le plus ancien. Il fut découvert à Nippur et date d’environ 2000 ans av. J.-C. Dans ce récit païen du déluge, Ziusudra se construisit un grand bateau pour échapper aux eaux. Une fois le déluge passé, Ziusudra offrit des sacrifices. La version babylonienne du déluge est contenue dans le 11e livre de l’Épopée de Gilgamesh (assyro-babylonienne). Ce récit se trouvait dans la bibliothèque du roi Assurbanipal (669-626 av. J.-C.). Les tablettes furent découvertes en 1853 par Hormuzd Russam. Le récit babylonien du déluge est celui qui se rapproche le plus du récit biblique. Le nom du héros babylonien est Uta-Napishtim, « l’immortel ». Le récit babylonien présente une leçon spirituelle, car il parle de la vie dans l’au-delà. Gilgamesh était le roi d’Uruk (Érec en Gen. 10.10 ; aujourd’hui Warka). Son ami, Enkidu, mourut et il voulut savoir si cet ami vivait dans l’au-delà. Il consulta Uta-Napishtim qui lui raconta l’histoire du déluge et lui expliqua le principe de l’immortalité. Le nom contient le récit des divinités babyloniennes : Ea, Adad, Annunaki, Ishtar, Enlil.

Il est intéressant de noter certaines ressemblances entre le récit babylonien du déluge et le récit biblique. Nul ne sait pour sûr d’où viennent ces ressemblances. Certaines théories ont été émises, mais elles ne comportent pas de preuves concrètes. Il faut aussi noter les différences fondamentales qui existent entre les deux récits. Les concepts moraux et théologiques des deux récits sont diamétralement opposés. Certains pensent que le récit biblique du déluge n’est qu’une copie améliorée du récit babylonien qui serait, quant à lui, beaucoup plus ancien. Il n’y a pas de preuves satisfaisantes à cette théorie. Tout au plus pourrait-on dire que les Hébreux et les Babyloniens avaient conservé dans leurs traditions le souvenir d’un même événement.

La répartition des nations bibliques primitives

Voir Gen. 9.18–10.32. La Genèse, comme l’indique son nom, est un livre qui nous parle des « origines ». Nous avons dans le passage cité ci-dessus la description généalogique et géographique de l’origine des nations après le déluge.

Les paroles de Noé en Gen. 9.25-27 sont étroitement liées aux généalogies et à la description des nations primitives après le déluge (Gen. 10). Ces paroles de Noé revêtent un caractère prophétique qu’il faut noter. Nous devons cependant être prudents dans notre interprétation de l’histoire des nations lorsque nous désirons comprendre la réalisation de cette prophétie.

Après le déluge la terre fut repeuplée par les descendants des trois fils de Noé : Sem, Cham et Japhet (Gen. 9.18). De Cham descendirent les peuples affiliés à Canaan, et ces peuplades habitèrent le pays de Canaan (Gen. 10.15-20). Ce sont ces Cananéens, descendants de Cham, qui, plus tard, ont manifesté les caractéristiques que leur attribue Noé (Gen. 15.16 ; 19.5 ; Lév. 18, 20 ; Deut. 12.31). Ils furent assujettis par les Israélites lors de la conquête de Canaan. Ils sont décrits comme des esclaves (ce qui comporte surtout l’idée d’un assujettissement politique).

Les textes d’Ougarit (découverts en 1929-1937) montrent les débauches et l’iniquité des Cananéens dont l’idolâtrie était la cause majeure. Puisque les descendants de Cham (surtout Canaan) devaient ainsi dégénérer moralement et spirituellement, on peut comprendre leur assujettissement politique, qui ne fut pas causé pour des raisons raciales, mais comme une conséquence de leur décadence. La conquête de Canaan appartient à cette période de l’histoire.

Japhet (Gen. 10.2-5). Gomer (en assyrien = Gimirraya). Ses descendants finirent par s’établir dans les régions plus au nord (Ézé. 38.6). Les descendants de Gomer sont associés aux Cimmériens de l’antiquité classique (Homère, « L’Odyssée » XI, 14). Assarhaddon les subjugua (681-668 av. J.-C.) ; Assurbanipal mentionne qu’ils envahirent la Lydie sous le roi Gugu – sans doute le Gog d’Ézé. 38.2.

Magog est un pays et un peuple du même nom dont le roi s’appelait Gog (voyez Ézé. 38.2 ; 39.6). Les historiens les associent à certaines hordes barbares nordiques. Madaï sont les Mèdes qui peuplèrent les régions montagneuses de l’est de l’Assyrie et du sud de la mer Caspienne (voyez aussi 2 Rois 17.6 ; 18.11 ; Ésa. 21.2, etc.). On retrouve leur origine et leur histoire dans les inscriptions assyriennes du IXe siècle avant J.-C.

Javan est le nom attribué aux Grecs ; ce sont aussi les Ioniens d’Homère. Les Hébreux vinrent en contact avec les Grecs et les appelèrent du nom de Javan. Les Grecs sont ainsi appelés dans certains textes de l’Ancien Testament (Ézéchiel 27.13 ; Ésaïe 66.19 ; Joël 3.6 ; Zach. 9.13 ; Dan. 8.21 ; 10.20). Les inscriptions les mentionnent aussi sous Sargon II (721-75), qui les combattit dans une bataille navale.

Tubal et Méschec : Ézé. 27.13 ; 32.26 ; 38.2 ; 39.1 ; Ésa. 66.19. Dans les inscriptions assyriennes, leur nom est Tabali et Muski. Les Tabali sont mentionnés sous Tiglath Piléser I (1100 av. J.-C.). Les Muski sont mentionnés sous Salmanasar III (860-825 av. J.-C.). D’après les inscriptions assyriennes, ils habitaient le nord-est de la Cilicie et l’est de la Cappadoce. On possède aussi un certain nombre de renseignements sur les descendants de Gommer et de Javan.

Les descendants de Gommer

Aschkenaz : (en assyrien = Ashkuz ; les Scythes). Au temps de Jérémie ils vivaient dans la région des montagnes d’Ararat. C’étaient de redoutables barbares et des guerriers sans pareil. Riphat : (1 Chr. 1.6 : Diphat). On retrouve leur nom dans les montagnes qu’on appelle « Riphées ». Togarma : en Arménie ce nom est Togarama. On pense que ce sont les Arméniens (cf. Ézé. 27.14 ; 38.6).

Les descendants de Javan

Ils s’établirent au sud et à l’ouest, le long de la mer méditerranée. Élischa : on retrouve leur nom dans les tablettes découvertes à Tell el-Amarna (= Alashia). Ézéchiel parle des étoffes qui proviennent des îles d’Élischa (Ézé. 27.7).

Tarsis : les historiens s’accordent pour reconnaître dans ce nom toute une région se situant au sud de l’Espagne, près de Gibraltar. C’était une région minière d’où les marchands de Tyr se procuraient du fer, de l’argent, du plomb et de l’étain (Ézé. 27.12).

Kittim : les inscriptions phéniciennes les appellent « le peuple de Kit et Kiti ». Ils auraient habité Chypre (une ville de Chypre s’appelait Kition : aujourd’hui Larnarca).

Dodanim : ils sont généralement associés aux Dardaniens d’Asie Mineure.

Les descendants de Cham (Gen. 10.6-14)

Les descendants de Cham s’établirent d’abord dans la basse Mésopotamie, au sud de l’Arabie, en Éthiopie, en Égypte et en Canaan.

Cusch : l’archéologie a retrouvé la ville de Kisch. Au début, ils habitaient près de l’embouchure du Tigre et de l’Euphrate, où Nimrod leur procura un grand pouvoir.

Mitsraïm : c’est l’ancien nom qui était donné à l’Égypte. Les tablettes de Tell el-Amarna montrent que les Cananéens appelaient les Égyptiens du nom de Mitsri.

Les descendants de Cusch

Saba : ses descendants habitèrent le pays de Schinear (basse Mésopotamie). Les inscriptions assyriennes mentionnent les descendants de Saba et précisent qu’au 8e siècle av. J.-C. ils émigrèrent au nord-ouest de l’Arabie. Dans les Écritures, Saba est aussi mentionné en relation avec l’Éthiopie et l’Égypte (Ésa. 43.3 ; 45.14).

Havila : une région porte ce nom qui s’étend du sud au centre de l’Arabie et qui est peuplée en partie par des Cuschites (voir Gen. 10.7, 29 ; 1 Chr. 1.9, 22).

Raema et Sabteca : leurs descendants représentent des tribus cuschites du sud-ouest de l’Arabie.

La généalogie de Cusch s’interrompt en Gen. 10.8-12, où l’on trouve certains détails sur Nimrod, autre descendant de Cusch. Cette description assez précise de Nimrod et de son genre de vie, ainsi que de ses « exploits », est intéressante et comporte, sans doute, une importante leçon pour nous. Il semble qu’avec Nimrod apparut cette sorte d’hommes qui s’élève au-dessus des autres par la guerre et les armes et cherche la gloire qui vient des conquêtes militaires. Nimrod est considéré, par nombre d’historiens et par les archéologues, comme le fondateur de l’Empire babylonien (voir Gen. 10.8, 9).

À travers des Écritures, Babylone est le symbole même de la puissance dominatrice et persécutrice de certaines nations (Ésa. 21.9 ; Jér. 50.24 ; 51.64 ; Apo. 16.19 ; 17.5 ; 18.3, etc.).

La description de Nimrod en Genèse 10 est intéressante : « Il était « un vaillant chasseur » devant l’Éternel ». On a souvent interprété cette description de Nimrod comme un aspect positif et louable de la personnalité de cet individu. À travers les Écritures l’idéal du chef, du roi, n’est jamais représenté par le « chasseur », mais plutôt par le « berger », l’homme paisible (voir 2 Sam. 5.2 ; 7.7 ; Apo. 2.27 ; 19.15).

Les villes de Babel, Érec et Accad, sur lesquelles Nimrod régna, sont bien connues des archéologues. Ils estiment que ces villes furent les premières capitales que le monde connut. Le pays de Schinear est une vaste plaine qui s’étend entre le Tigre et l’Euphrate, près de l’embouchure de ces deux fleuves. Les inscriptions cunéiformes parlent de cette région. Ces inscriptions divisent la région de Schinear en deux parties. Le nord de Schinear est appelé Accad (capitale : Babel/Babylone et Akkada) ; le sud est appelé Sumer (capitale Uruk/Érec). C’est sous Hammourabi (1728-1686 av. J.-C.) que Babel devint la capitale de toute la basse-Mésopotamie. Babel était aussi puissante au sud que l’était Mari au nord-ouest. L’archéologie a permis de découvrir la ville d’Érec (en akkadien = Uruk) dont le nom moderne est Warka. C’est là qu’on découvrit la première ziggourat (temple en forme de tour). Sous Sargon, Accad devint une puissante capitale de la Mésopotamie.

Les monuments babyloniens et assyriens confirment la véracité des Écritures en montrant que les villes bibliques ont bien existé telles Assur et Ninive.

Les descendants de Mitsraïm

Les Ludim : les habitants de Lud sont devenus des archers au service de l’Égypte (Jér. 46.9 ; Ézé. 27.10 ; 30.5 ; cf. Ésa. 66.19). Descendants de Canaan : Sidon : Sidon est la ville phénicienne la plus ancienne. Les Phéniciens étaient d’ailleurs appelés les Sidoniens du 11e au 8e siècle av. J.-C. (cf. 1 R. 5.6 ; 16.31). Homère mentionne souvent Sidon, mais il ne mentionne pas Tyr.

Heth : de nombreux chercheurs s’accordent pour dire que le mot « Hittite » vient du nom Heth. Avant les découvertes archéologiques qui ont été faites sur les Hittites, les critiques de la Bible niaient jusqu’à l’existence de ce peuple, car seule la Bible le mentionnait. En 1906-1907, le professeur Winckler découvrit environ 10 000 tablettes à Boghazkeui. Ces tablettes mentionnaient les Hittites.

Les Jébusiens : ils habitaient principalement Jebus, ancien nom de Jérusalem (Jos. 15.63 ; Jug. 19.10, 11 ; 1 Chr. 11.4). Le roi des Jébusiens fut tué par Josué (Jos. 10.23-26), et leur territoire revint à la tribu de Benjamin (Jos. 18.28). Les Jébusiens furent définitivement chassés de Sion par David (2 Sam. 5.6, 7) et furent soumis par Salomon (1 Rois 9.20). Les tablettes trouvées à Tell el-Amarna témoignent de l’origine hittite des Jébusiens.

Les Amoréens : avec les Hittites, les Amoréens étaient un des peuples les plus puissants de la Palestine. Ils dominaient sur un grand territoire à l’est du Jourdain (Deut. 3.8 ; Jug. 11.22). Ils occupaient aussi le territoire de Juda (Jos. 10.5). Ils ne furent pas tous détruits, et leurs descendants furent finalement faits esclaves par Salomon (Juges 1.35 ; 3.5 ; 1 Sam. 7.14 ; 1 Rois 9.20, 21).

Les Guirgasiens : c’est une tribu de Canaan (Gen. 15.21 ; Deut. 7.1 ; Jos. 3.10 ; 24.11 ; Néh. 9.8). Les archéologues sont encore dans l’obscurité à leur sujet. Il en est ainsi des Héviens. Cependant, les Héviens sont aussi appelés les Horites (Gen. 34.2 ; Jos ; 9.7) et les archéologues ont retrouvé la trace de ces derniers.

Les Arkiens s’établirent à Arka, qui existe encore aujourd’hui (Tell Arka). Les tablettes de Tell el-Amarna appellent le lieu « Inkata ». Les Siniens : Tiglath Piléser III mentionne la ville de Sin (nord de la Phénicie). Les Arvaniens : leur ville (Arvade) est mentionnée dans les tablettes du Tell el-Amarna, dans les chronologies des rois assyriens. Les Tsémariens : leur ville (Tsimura) est aussi mentionnée dans les tablettes du Tell el-Amarna. Les Hamathiens : ils habitaient Hamath sur l’Oronte. Harold Ingholdt retrouva leur ville en 1932-1939.

Sem (Gen. 10.21-31)

L’introduction à la généalogie des fils de Sem est particulièrement solennelle dans le texte original. Les fils de Sem (les nations sémitiques) devaient jouer un rôle important dans le déroulement du plan du salut.

Sem fut le père de « tous les fils d’Héber ». Les « fils d’Héber » comprennent les tribus arabes (vs. 25-30) ainsi que les descendants d’Abraham, les Israélites (11.16-26) et finalement les Ismaélites, les Édomites et les Madianites (cf. 25.2). Le nom Héber est bien sûr étymologiquement à l’origine du nom primitif du peuple juif : les Hébreux. Le nom signifie « celui qui vient d’au-delà de la rivière » (l’Euphrate ; voir Josué 24.3).

Les descendants de Sem

Élam : c’est le nom d’un peuple et d’une région dans l’est de la Babylonie, dont la capitale était Suse (voir Néh. 1.1 ; Esth. 2.8). C’est à Suse que le Français Jacques de Morgan découvrit en 1901 le Code d’Hammourabi.

Assur : lui et ses descendants sont les ancêtres du grand peuple assyrien. Les villes d’Assur et de Ninive furent fondées par des Sémites, qui très tôt s’étaient établis dans les vallées du Tigre et de l’Euphrate (voir Gen. 10.11).

Arpachsad : ce nom est demeuré une énigme pour l’archéologie.

Lud : beaucoup de chercheurs sont de l’avis que lui et ses descendants furent les ancêtres des Lydiens (Asie Mineure).

Aram : l’ancêtre du peuple araméen, peuple qui s’étendit en Syrie et en Mésopotamie. Abraham a séjourné à Charan (Paddan Aram), et de là il immigra en terre de Canaan. La langue araméenne (ou syriaque) devint très populaire (cf. 2 Rois 18.26). On trouve même de l’araméen dans certaines portions des Écritures de l’Ancien Testament (voyez Daniel et Esdras).

Il semble que selon les Écritures l’incident de la tour de Babel se soit déroulé au temps d’un des fils d’Héber : Péleg (ce nom veut d’ailleurs dire « partager, diviser »). Il est écrit à son sujet : « De son temps la terre fut partagée. »

Les descendants de Noé s’établirent dans une région très fertile : le « pays de Schinear » en Mésopotamie. La fierté et l’ambition de ces hommes se manifestent dans leur désir de bâtir une ville. Cette ville devait avoir une tour « dont le sommet touche le ciel » (Gen. 11.4). Même après la destruction de la tour de Babel, les Babyloniens et les Assyriens continuèrent à montrer leur arrogance et leur fierté, en érigeant d’énormes tours.

Le désir de ces peuplades était de devenir puissants par leurs propres efforts et d’exhiber leur fierté devant la terre et son créateur, en s’unissant pour faire une tour gigantesque et pour former une nation unique et puissante (Gen. 11.6), contrairement aux commandements de Dieu qui avait dit : « Soyez féconds, multipliez et remplissez la terre » (Gen. 9.1). La puissance humaine, l’impérialisme national, le totalitarisme politique ont toujours été une marque d’idolâtrie, et nulle nation dans l’histoire n’a pu provoquer impunément la majesté divine.

L’état d’esprit des hommes de Genèse 9 ressort non seulement dans la Bible, mais aussi des documents cunéiformes qui ont été retrouvés et qui racontent les « exploits » de l’humanité. Babylone devait devenir à travers les Écritures le symbole de cette arrogance humaine qui s’efforce de défier la souveraineté de Dieu en glorifiant l’être humain, la créature, plutôt que le créateur, en glorifiant la politique humaine plutôt que la politique divine (cf. po. 17-18). Le livre de Daniel et le livre de l’Apocalypse sont une démonstration magistrale de l’inutilité de tels efforts de la part de l’homme, de la vanité de tels sentiments de supériorité chez les hommes et les nations. La confusion des langues fut le moyen que Dieu employa pour empêcher que les hommes ne réalisent leurs projets orgueilleux. Seul Dieu mérite d’être glorifié.

Il est important de voir la relation qui existe entre Genèse 10 et 11, entre la diversité des races et la diversité des langues. Il est aussi important de se souvenir que la Bible place le récit de la tour de Babel après et non avant le déluge. La littérature cunéiforme primitive n’offre aucun récit qui soit parallèle au récit de la tour de Babel en Genèse.

Les ziggourats du monde babylonien étaient de gigantesques tours accolées aux temples. La ziggourat la plus ancienne qui a été découverte est celle d’Uruk (« Érec » : Gen. 10.10), qui date de la fin du IVe siècle av. J.-C. Il y a peut-être une parenté entre les ziggourats et la tour de Babel, mais la tour de Babel n’est pas appelée une « ziggurat », mais une « tour » (Migdal).

Les patriarches et l’archéologie

De nombreuses théories s’efforcent de réduire les récits bibliques à des légendes et des mythes. Le critique allemand Wellhausen pensait lui-même qu’Abraham était une « création libre de l’inconscient artistique ».2Prologomena to the History of Israël, Eng. Translation, 1885, p. 320.

L’archéologie a amplement démontré que celui qui a fait preuve « d’inconscient artistique » n’est pas l’homme qui nous rapporte l’histoire d’Abraham, mais plutôt Wellhausen lui-même ! La théorie de Wellhausen et de ses disciples suppose que les récits bibliques sur les patriarches avaient été transmis oralement depuis l’origine et avaient été composés beaucoup plus tard, seulement vers les 8e et 9e siècles av. J.-C. Bien sûr, cette théorie rejetait aussi l’inspiration divine des Écritures, considérées comme le produit de l’homme, en particulier le produit de l’évolution de la pensée religieuse chez les Hébreux.

Il n’est pas faux de dire que Dieu s’est révélé de plus en plus clairement aux Hébreux et que cela leur permit de saisir toujours mieux le sens de leur religion. Mais affirmer que la révélation biblique n’est que le produit de l’esprit humain constitue un rejet de la puissance de Dieu et de l’inspiration des Écritures.

Il existe une faille évidente dans cette théorie : le récit biblique sur les patriarches ne présente aucun parallèle avec les conditions sociales et culturelles de l’époque « plus tardive » où le récit aurait été supposément composé. Albright, archéologue mondialement réputé, le dit très bien :

« Wellhausen et ses disciples ne pouvaient pas discerner cette difficulté et cette faille à leur théorie pour la simple raison qu’ils étaient ignorants des réelles conditions de vie qui sévissaient en Palestine à cette époque plus tardive (les 8e et 9e siècles) et à l’époque patriarcale. »3W. F. Albright, The Archeology of Palestine of the Bible, New York, 1935 – pp. 130sv.

Pourtant, les théories de Wellhausen, avec tout ce qu’elles avaient d’attrayant pour le sceptique, ont parfois persisté jusqu’à ce jour.4Voyez R. Weill « La légende des patriarches et l’histoire » Revue des études sémitiques, 1937 – pp. 145-200.

Les découvertes archéologiques du siècle dernier et de ce siècle ont eu pour résultat de renverser les théories du sceptique. En réalité, ces théories se basaient, non pas sur notre connaissance concrète des conditions de vie pendant ces époques décrites dans la Bible, mais sur le peu d’informations que nous possédions – ce qui permettait à l’imagination et aux suppositions d’avoir libre cours. L’archéologie est une science qui nous procure des évidences concrètes, et non des théories. Ces évidences vont dans le sens à confirmer la véracité historique des Écritures et témoignent en faveur des convictions plus traditionnelles sur son authenticité.

Ce que nous décrit la Bible à propos des patriarches correspond bien à ce qui existait à l’époque en Palestine. Le fait est que l’humilité et l’honnêteté intellectuelles devraient forcer nombre d’individus à changer leur point de vue sur les premiers chapitres de la Bible. Certains l’ont fait. D’autres ont persisté dans leur scepticisme.5R. P. Devaux, « Revue Biblique » LIII (1946) – pp. 321-348, LV (1948) – p. 321-347 ; LVI (1949) – p. 5-36.

Bien sûr, aucune découverte ne mentionne les patriarches eux-mêmes. Ce que l’archéologie a montré, c’est que leur façon de vivre, leur culture et leur vie sociale correspondent bien à l’époque où la Bible les place. C’est là une évidence en faveur de la validité historique du récit et en faveur d’une date très ancienne pour la rédaction du récit. Albright est très précis dans ce sens puisqu’il peut dater aux environs de 1800-1500 av. J.-C. ce qui nous est rapporté dans les récits de la Genèse qui parlent des patriarches.

Quelques exemples relatifs à la vie des patriarches

Abraham et Nuzu. La ville de Nuzu fut l’objet d’un grand nombre de fouilles entre 1925-1941. Des milliers de documents intéressants y ont été découverts qui nous rapportent certaines coutumes et certaines lois du temps où les patriarches vivaient.

L’héritier adoptif. À l’époque patriarcale, la coutume était pour un couple sans enfant de faire hériter la fortune familiale et de transmettre l’autorité du patriarche au serviteur le plus fidèle. Nous retrouvons une trace de cette coutume en Gen. 15.2 à propos d’Éliézer de Damas. Les lois de Nuzu précisent cependant que la promesse d’héritage faite à un serviteur fidèle pouvait être annulée dans le cas d’une naissance inattendue dans la famille. C’est pour cela que Dieu pouvait affirmer à Abraham qu’Éliézer ne serait pas l’héritier de sa maison (avant la naissance d’Isaac), car Dieu connaissait d’avance la naissance d’Isaac.

Le mariage. La loi de Nuzu stipulait que si la femme du chef de famille était stérile, elle pouvait fournir une esclave à son mari dans le but d’avoir un enfant (voir Gen. 16.1-16).

Le droit d’aînesse. Une tablette découverte à Nuzu raconte le cas d’un frère qui vendit son droit d’aînesse pour trois brebis. Cela rappelle l’histoire d’Ésaü et de Jacob (Gen. 25.27-34).

Les teraphim. Ces objets (petites statuettes représentant des divinités, et qu’on plaçait dans les maisons) existaient à cette époque ainsi qu’en témoigne la Bible (Gen. 31.34).

Abraham et Mari. Cette ancienne cité se trouvait sur l’actuel Tell Hariri. André Parrot, archéologue français, y effectue des recherches minutieuses dès 1933. On y a trouvé 20 000 tablettes dans le palais royal, un temple dédié à Ishtar et une ziggourat (André Parrot, Mari, une ville perdue, 4e éd. Paris 1946, p. 1-24). Au temps d’Abraham (env. 2000 ans av. J.-C.), Mari était une capitale importante de la Mésopotamie.

Nachor. La ville de Nachor (Gen. 24.10) est mentionnée dans une tablette découverte, datée d’environ 1700 avant J.-C., et dans laquelle une habitante de Nachor s’adresse au roi de Mari (centre urbain importante du Moyen-Orient entre 2900 à 1759 avant J.-C. et situé dans l’actuelle Syrie).

Les devins. L’époque patriarcale était fructueuse en devins et l’occultisme était couramment pratiqué. On constate que les patriarches restèrent purs de toutes ces influences (Gen. 35.2-4).

Le nom « Abraham » n’était pas inconnu 2000 ans av. J.-C. en Mésopotamie. En effet, on trouve ce nom sous différentes formes en Mésopotamie à cette époque : A-ba-amra-m ; A-ba-ra-ma ; A-ba-am-ra-am.6Voir Devaux « Revue Biblique », LIII (1946) p. 323. On trouve même le nom de Jacob mentionné dans la liste de Thoutmosis III, 15e siècle av. J.-C. (Ya’-qub’-el = « Que El protège »).

H. H. Rowley (1890-1969) fut l’éditeur du Journal of Semitic Studies ; il fut frappé des similarités qui existent entre les récits bibliques et les découvertes archéologiques qui touchent à la vie et aux coutumes à l’époque des patriarches (env. 2000 ans av. J.-C.).7Voir H. H. Rowley, « Recent Discoveries and the Patriarchal Age » – Bulletin of the John Rylands Library (Manchester) XXXII (Sept. 1949) – p. 76. Comment certains peuvent-ils penser que ces écrits furent rédigés à une époque (8e et 9e siècles) où ces anciennes lois et coutumes n’existaient plus ? Faudrait-il supposer que ces écrivains se seraient souvenus de lois depuis longtemps oubliées ou qu’ils les auraient inventées pour les insérer dans leur récit afin de faire croire à leur authenticité ?

Si nous acceptons le texte comme étant authentiquement ancien et écrit de la main de Moïse (15e siècle av. J.-C.), de telles précisions dans le texte biblique ne sont nullement étonnantes. Nous recommandons à ce sujet Devaux.8« Les Patriarches Hébreux et les Découvertes Modernes » Revue Biblique, LIII (1946), pp. 321-348 ; LV (1948), pp. 231-247 ; LVI (1947) pp. 5-36.

Textes égyptiens et autres découvertes

Les tribus nomades au Moyen-Orient

Des écrits égyptiens ont été déchiffrés sur des vases de l’époque des patriarches. Ces écrits témoignent de l’existence de tribus nomades au Moyen-Orient au temps de pharaons de cette époque.9Kurt Sethe, 1926 – Berlin dans W. F. Albright The Archeology of Palestine, 1949 p. 83.

La captivité d’Israël en Égypte

Selon la chronologie qu’on peut établir à partir de la Bible hébraïque, Jacob et sa famille auraient émigré en Égypte autour de l’an 1871 av. J.-C. C’était sous la 12e dynastie égyptienne pendant le Moyen Empire (env. 2000-1780 av. J.-C.).

Couleur locale confirmée par l’archéologie

Le commerce

Gen. 37.25 décrit avec précision les échanges commerciaux qui existaient à cette époque entre l’Égypte et certaines peuplades asiatiques (cf. aussi Gen. 43.11). Une peinture découverte sur un tombeau égyptien datant de 1900 av. J.-C. représente un de ces marchands qui est appelé « prince d’un pays étranger ». Son visage est typiquement sémitique. Il a de longs cheveux noirs et bouclés qui lui tombent dans le cou. Sa barbe est pointue, et il porte un long et épais manteau. Lui et les membres de sa famille portent des arcs et des lances. L’inscription qui accompagne cette peinture précise qu’il s’agit d’Asiatiques qui apportent de la « peinture pour les yeux en Égypte ».10L. Grollenberg « Atlas Biblique » p. 72. M. F. Unger, Archeology and the Old Testament, Zondervan, p. 130.

L’Égypte jouissait alors d’une certaine abondance, ainsi que nous pouvons le constater aux dires des Hébreux en Ex. 16.3 et Nom. 11.4, 5, 18. Les écrits égyptiens de ce temps témoignent eux-mêmes de cette opulence. W. Keller cite un écrit égyptien d’un certain Pai-Bes :

« Je suis arrivé à Pi-Ramsès et je crois que cette ville merveilleuse n’a pas sa pareille. Le même dieu Ra l’a fondée sur les plans de Thèbes. On y mène une vie exceptionnelle. Sa campagne offre une profusion de bonnes choses. Tous les jours on y livre de la viande et des aliments frais. Ses étangs sont riches en poissons, ses lagunes en oiseaux, ses pâturages sont couverts d’herbe verte et ses fruits ont la saveur du miel. Ses entrepôts sont remplis d’orge et de céréales diverses ; ils se dressent jusqu’au ciel. On y trouve des oignons et de l’ail pour les aliments, des grenades aussi, des pommes, des olives et des figues qui lui viennent des vergers. Son vin doux de Kenkémé est plus fin que le miel. Le fleuve lui livre du sel et du salpêtre. Ses bateaux vont et viennent. Tous les jours la nourriture y est fraîche pour le bétail. On est heureux d’y habiter, et personne n’y mendie, car les petites gens y vivent aussi bien que les grands… »11Werner Keller, La Bible arrachée au sable, Presses de la Cité Paris, pp. 108-109.

La captivité en Égypte et l’Exode

Il y a eu de nombreuses tentatives pour essayer de discréditer le récit biblique de l’Exode qui nous rapporte la captivité d’Israël en Égypte et sa délivrance. On trouve cependant un certain nombre d’évidences archéologiques qui confirment que les Hébreux, à une époque très ancienne, avaient eu des contacts avec l’Égypte. W. F. Albright écrit à ce propos :

« Dans l’état actuel de nos connaissances de la topographie de la partie orientale du Delta du Nil, les précisions données par la Bible au sujet du début de l’exode (Ex. 12.37 ; 13.20) sont absolument exactes, géographiquement parlant. Nos connaissances de la topographie de l’archéologie nous fournissent un grand nombre de preuves du caractère historique du livre de l’Exode. L’attitude de scepticisme vis-à-vis des anciennes traditions historiques d’Israël n’est pas justifiée. »

Les noms des Lévites

Il est frappant de rencontrer des noms typiquement égyptiens dans les descendants de Lévi : Moïse, Assir, Paschhur, Hophni, Phinées, Merari.12Théophile Meek, « Moses and the Levites » The American Journal of Semitic languages and litterature LVI, pp. 117 f. Cette proportion de noms purement égyptiens parmi les lévites ne peut pas être accidentelle. Le nom de Moïse est typiquement égyptien : Mose est un nom qu’on retrouve chez beaucoup de rois et de personnages égyptiens (par exemple : Thoutmosis ainsi que le nom de quatre rois de la 18e dynastie). Mose voulait dire « l’enfant ». Le mot hébreu masha qui ressemble à Mose veut dire « retirer » (voir Ex. 2.10).

La vie en Égypte

Les récits de l’Exode et de la Genèse sont étonnants de couleur locale dans les descriptions de la vie égyptienne. Certaines fonctions dans l’administration égyptienne ont été retrouvées grâce à l’archéologie. Cela est vrai du « chef des échansons » et du « chef des panetiers ». Le chef des échansons était chargé de s’occuper des boissons du roi, de leur préparation et de leur service ; le chef des panetiers était en charge de la nourriture : c’était le chef des cuisiniers et des serveurs.

Les monuments égyptiens montrent l’importance de ces tâches dans l’ancienne Égypte.13Hengstenberg : « Egypt and the Book of Moses » p. 27& Wilkinson « Ancient Egyptians » ii. 33-39. (Potiphar établit Joseph « sur sa maison » (Gen. 39.4.) La traduction ne rend pas avec précision le titre que portaient certains nobles égyptiens et qui fut celui de Joseph. On peut faire la même remarque à propos de Gen. 41.40 où le titre correspond à la position de « premier ministre », ou de « vizir » dans l’histoire égyptienne.

Les famines n’étaient pas inconnues en Égypte à l’époque de Joseph. Une inscription égyptienne datant de 100 ans av. J.-C. rapporte qu’il y eut une grande famine de 7 ans sous le Pharaon Zoser (3e dynastie – 2700 ans av. J.-C.) (G. Wright& F. Filson « The Westminster »).

Les monuments égyptiens témoignent de l’importance des magiciens en Égypte (voir Gen. 41.8sv). Les mêmes monuments témoignent que les bergers asiatiques étaient « en abomination » aux Égyptiens, ainsi que leur contact (voir Gen. 43.32 ; 46.34). La momification de Joseph est en accord avec les pratiques égyptiennes (Gen. 50.2, 26) – la momification étant une dernière marque de respect rendue aux dignitaires et personnages importants (Gen. 50.2, 26).

Le pays de Gosen où s’établirent les Hébreux a toujours été la région la plus fertile de l’Égypte (cf. Gen. 47.11). C’était aussi une coutume égyptienne d’offrir asile à certaines peuplades pendant les périodes de détresse et de famine. Ainsi en témoigne un document datant de 1350 av. J.-C.

On trouve en Égypte des localités qui portent des noms plutôt cananéens. Cela est surtout vrai du Nouvel Empire (1650-1085 av. J.-C.). Cela montre une influence sémitique pendant les siècles et qui précéda le Nouvel Empire. (Voyez Succoth, Ex. 12.37 ; Migdol, Ex. 14.2 ; Baal Tsephon, Ex. 14.2.)

La date de l’exode

Il existe trois points de vue sur la date de l’exode, lesquels s’harmonisent avec le texte biblique :

  1. 1441 av. J.-C. sous Aménophis II (18e dynastie)
  2. 1508-1504 av. J.-C. sous Thoutmes II (18e dynastie)
  3. 1290 av. J.-C. sous Ramsès II (19e dynastie)

Les pharaons

Le témoignage biblique, historique et archéologique tend à montrer que les deux premiers pharaons, Aménophis II et Thoutmès II sont vraisemblablement le point de vue le plus correct pour dater l’exode.

PHARAONS DU NOUVEL EMPIRE (1650-1085 AV. J.-C.)

XVIIedynastie (1650-1567 av. J.-C.)

Nebkheperré Ankef VII
Sekénenré Taâ I
Sekénenra Taâ II
Ouadjekheperré Kamosis

XVIIIdynastie (1567-1320 av. J.-C.)

Nobhetiré Amosis – 1570-1546
Djesejaré Aménophis I – 1546-1526
Akheperkaré Thoutmosis I – 1525-1512
Akheperenré Thoutmosis II – 1512-1504
Makaré Hatshepsut – 1503-1482
Menkheperré Thoutmosis III – 1504-1450
Akheperouré Aménophis II – 1450-1425
1 Rois 6.1– Merkhenperoré Thoutmosis IV – 1425-1417
Nebmaré Aménophis III – 1417-1379
Neferkheperouré Aménophis IV – Akénaton 1379-1362
Akheperouré Semenekhkaré – 1364-1361
Nebkheperouré Toutankhamon – 1361-1352
– inconnu –
– inconnu –

XIXedynastie (1320-1085 av. J.-C.)

Menpehtiré Ramsès I – 1320-1318
Menmaré Séthi I – 1318-1304
Sousirmaré Ramsès II – 1304-1237

Ramsès II (1292-1190 av. J.-C.)

La date de l’exode sous Ramsès II est celle qui est adoptée par les critiques libéraux. Ils se basent pour cette date sur ce qui est dit en Ex. 1.11 et le fait que Ramsès II prétendit avoir construit les villes de Pithom et de Ramsès. Cependant, Ramsès II est célèbre pour s’être souvent prétendu l’auteur de travaux qui n’étaient pas les siens. D’autre part, il n’y a pas qu’une seule ville en Égypte qui porte le nom de Ramsès. Il n’y a guère d’évidences en faveur de la date de l’exode sous Ramsès II. Les découvertes plus récentes contredisent cette date.

Aménophis II (1450-1425 av. J.-C.), pharaon de l’Exode

1 Rois 6.1 place l’exode aux environs de 1441 av. J.-C. On peut calculer cela avec une certaine précision en se basant sur la date de la mort de Salomon aux environs de 961 av. J.-C. de l’avis général des érudits. Puisque Salomon régna 40 ans, la date de l’exode se situerait donc autour de 1441 av. J.-C. Certains critiques ont tendance à situer la date de l’exode environ deux siècles plus tard. Pour faire cela, ces critiques doivent rejeter l’authenticité de la date qui nous est donnée en 1 Rois 6.1 quant au début de la construction du temple. Ce verset s’harmonise d’ailleurs avec les chronologies que l’on trouve dans le Pentateuque.

Aménophis II régna de 1450 à 1425 av. J.-C. L’exode se serait donc déroulé au début de son règne (1441). Aménophis II était le fils de Thoutmosis (ou Thoutmès) III (1482-1450). Ce dernier pharaon est un des pharaons les plus célèbres, et il construisit un puissant empire. La personnalité de Thoutmosis III s’harmonise parfaitement avec le pharaon des premiers chapitres de l’Exode qui opprima Israël avant l’exode. Moïse attendit la mort de l’oppresseur (Thoutmosis III) avant de rentrer en Égypte (Ex. 2.23).

Si Aménophis II était le pharaon de l’exode, son fils premier-né serait décédé des suites de la dernière plaie qui s’abattit sur l’Égypte : la mort des premiers-nés. Or, l’archéologie témoigne que ce ne fut pas le premier-né d’Aménophis II qui lui succéda. Cela ressort lorsque nous examinons les monuments qui ont trait à Thoutmosis IV le successeur d’Aménophis II (1425-1412). L’un de ces monuments rapporte que Thoutmès IV fut étonné d’un rêve qu’il fit et dans lequel il se voyait pharaon d’Égypte. Or, pourquoi aurait-il été étonné d’être le successeur d’Aménophis II s’il avait été son fils premier-né ?

Thoutmosis III, le père d’Aménophis II, serait donc le pharaon que mentionne le début du livre de l’Exode et qui « n’avait pas connu Joseph ». C’était un fanatique de constructions grandioses, et il employait à cette tâche des esclaves sémites et asiatiques. La tombe d’un vizir de l’époque dépeint la tâche des esclaves qui fabriquaient des briques avec de la paille (cf. Ex. 5.6-19). Les personnages représentés sur cette tombe ont d’ailleurs des traits tout à fait sémitiques. Thoutmosis III était en outre un pharaon puissant et préoccupé de soumettre les nations qui côtoyaient l’Égypte. Il combattit nombre de peuplades qui habitaient cette région et les subjugua. Faut-il voir en cela la main de Dieu qui déjà châtiait les nations cananéennes et amoindrissait leur puissance afin de faciliter la conquête de Canaan par Israël ?

L’exode et la terre de Canaan à cette époque (vers 1441 av. J.-C.)

Si nous nous en tenons à 1441 av. J.-C. pour la date de l’exode, les Israélites auraient donc conquis le pays de Canaan autour de 1401 av. J.-C., quarante années plus tard (Nombres 32.13). À l’époque de la conquête de Canaan, Aménophis III, puis Aménophis IV, étaient pharaons.

Les tablettes découvertes à Tell el-Amarna nous présentent l’histoire de Canaan à l’époque de la conquête (1400-1366 av. J.-C.). Selon ces tablettes, la terre de Canaan fut envahie par des peuplades appelées Habiru. Qui étaient ces Habiru qui envahirent Canaan à la même époque que la conquête de Canaan par les Hébreux ? Nul ne sait pour sûr. Cependant, le nom « Habiru » présente une ressemblance étymologique assez frappante avec le mot « Hébreux » (les érudits ne sont pas tous d’accord sur ce point). Ces Habiru envahirent surtout le sud et la partie centrale de Canaan à l’époque d’Aménophis III. Cette précision correspond étrangement avec la conquête de Canaan par les Hébreux qui commença par le sud et le centre de Canaan.

Les tablettes de Tell el-Amarna nous rapportent un document intéressant. C’est une lettre que le gouverneur de Jérusalem adressa à Aménophis IV (Akhnaton) (environ 1387-1366 av. J.-C.) et dans laquelle le gouverneur de Jérusalem supplie le pharaon d’Égypte de venir le délivrer des envahisseurs Habiru (Samuel A.B. Mercer, The Tell el-Amarna Tablets, Toronto 1939 – vol II n° 287 livres 56-60). L’histoire ne nous rapporte pas que cette aide fut effectivement accordée par le pharaon.

La destruction de Jéricho et la date de l’exode

Les fouilles qui ont été effectuées sur l’emplacement de la ville de Jéricho permettent de penser que la ville fut détruite aux alentours de 1400 av. J.-C. Aujourd’hui ce lieu est appelé Kom El-Sultan et se trouve au-dessus d’une oasis qu’on appelle Ain’El-Sultan. On connaît assez bien l’histoire de la ville de Jéricho grâce aux fouilles d’Ernest Sellin et de la Deutsche Orient-Gesellschaft (1907-1909), et grâce aux découvertes de John Garstang (1930-1936). (M.F. Unger : Archeology and the Old Testament, Grand Rapids, Michigan 1954 – p. 147.)

Plusieurs villes furent construites sur les ruines de Jéricho qui occupait une position stratégique très favorable en Palestine. Jéricho, ainsi que les villes qui se sont élevées sur ses ruines, furent successivement détruites, et les archéologues désignent toutes ces villes par des lettres alphabétiques. La ville qui fut prise et détruite par les Israélites est appelée Jéricho D, et l’on pense qu’elle fut construite vers 1500 ans av. J.-C. Le mur extérieur de cette ville avait une épaisseur de près de deux mètres. Ce mur était séparé d’un mur intérieur par un espace d’environ huit mètres, et ce mur intérieur avait une épaisseur dans l’espace séparant les deux murs. Les deux murs, ainsi que les maisons construites entre les deux, formaient une seule masse, et certaines maisons donnaient directement sur le mur extérieur (voir la maison de Rahab en Jos. 2.15).

Les fouilles qui ont été faites sur la ville D indiquent que le mur de la ville fut violemment détruit, comme par un tremblement de terre. Le rempart extérieur tomba vers le dehors, et le rempart intérieur tomba vers le dedans de la ville (voir W. Keller, La Bible arrachée aux sables, p. 146). La ville fut ainsi détruite et ne fut rebâtie qu’aux environs de 860 av. J.-C. ; c’est en effet ce que témoigne la Bible qui nous rapporte sa reconstruction au temps du roi Achab (1 Rois 16.34). Garstang date la destruction de Jéricho D aux environs de 1400.

Nous pouvons conclure qu’avec nos connaissances actuelles la date de l’exode semble être sous le pharaon Aménophis II. Même en considérant la date de l’exode sous le pharaon Aménophis II, il est toujours possible de considérer que celle qui recueillit Moïse fut Hatchepsout. Il est très vraisemblable que cette dernière était attachée à l’enfant qu’elle avait recueilli et que, de ce fait pendant sa vie, les Israélites ne furent pas persécutés comme cela s’avéra par la suite. Il est même permis de supposer que Thoutmosis III (à peu près du même âge que Moïse) cultivait une certaine jalousie envers cet Hébreu. Cette haine particulière de Thoutmosis III envers la personne de Moïse aurait motivé la fuite de Moïse et expliquerait le fait qu’il attendit la mort de ce pharaon avant de retourner en Égypte (Ex. 2.23). Aménophis II poursuivit la politique de persécution entreprise par Thoutmosis III (Ex. 3.9), et c’est à ce pharaon que Moïse eut à faire (Ex. 3.10).

Conclusions

1. Amosis entreprend la révolte contre les envahisseurs hyksos et fonde la XVIIIe dynastie. À partir de ce moment, les étrangers en terre d’Égypte vont commencer à être persécutés à cause du regain de nationalisme qui sévit en Égypte, réaction des Égyptiens après les années de subjugation par les Hyksos. Ces persécutions augmentent d’autant plus que les Hébreux sont prospères et nombreux (Ex. 1.6-10).

2. Aménophis I, puis Thoutmosis I montent sur le trône d’Égypte et poursuivent cette politique de persécution des Hébreux. Cependant, cette persécution n’est encore que légère à côté de ce qui attend les Hébreux.

3. Thoutmosis II monte sur le trône d’Égypte, et il est un fanatique de constructions (notamment à Karnak). Il voit un bon moyen de mener ses projets à terme en faisant des Hébreux des esclaves (Ex. 1.8-14). Ce pharaon était sans scrupules, et pour lui le temps de Joseph était loin. Il voulait aussi réduire la puissance des Hébreux, et il essaya de faire cela en ordonnant la mort de leurs premiers-nés (Ex. 1.15-22). La fille de pharaon Thoutmosis I, femme et sœur de Thoutmosis II (Thoutmosis I n’était pas encore mort, et la Bible, en parlant de la « fille du pharaon », fait sans doute une référence au pharaon précédent Thoutmosis I), Hatchepsout, recueillit l’enfant Moïse. Thoutmosis II eut un enfant d’une concubine et qui devait devenir Thoutmosis III. Il est très possible que Moïse et le futur Thoutmosis III se connaissaient très bien et que le fils de Thoutmosis II voyait d’un mauvais œil la présence de ce rival au trône.

Moïse fut élevé et « instruit dans toute la sagesse des Égyptiens » (Actes 7.22). À l’âge de quarante ans, Moïse « visita ses frères » et, à cette occasion, il tua un Égyptien qui maltraitait un Israélite. Il avait déjà une grande foi en Dieu (sa propre mère fut sa nourrice et dut lui enseigner la loi de Dieu), car « il pensait que ses frères comprendraient que Dieu leur accordait la délivrance par sa main » (Actes 7.25). Cependant, les Israélites ne comprirent point cela, et Moïse dut s’enfuir dans le pays de Madian. Hatchepsout mourut, puis, longtemps après la fuite de Moïse (40 ans après), le pharaon Thoutmosis III mourut aussi (Ex. 2.23). C’est alors qu’Aménophis II monta sur le trône.

Aménophis II continua à utiliser les Hébreux pour les constructions, car lui aussi était célèbre pour ses goûts grandioses. C’était un jeune pharaon, plein d’ambition. Son cœur avait été endurci par la domination d’Hatchepsout et par les succès de Moïse. Moïse s’était enfui et il revenait vers ce pharaon dans l’apogée de sa gloire pour lui demander de libérer les Israélites. Tout cela coïncide parfaitement avec l’endurcissement persistant de ce pharaon aux demandes de Moïse. Il apparaît aussi, comme nous l’avons dit, que Thoutmosis IV, son successeur, n’était pas son fils premier-né, conséquence de la dixième plaie qui s’abattit sur l’Égypte.

Les tablettes de Tell el-Amarna

Aménophis IV (l’époux de Néfertiti) accéda au trône d’Égypte en l’an 1380 av. J.-C. Il s’efforça aussitôt de réformer la religion égyptienne en exigeant l’adoration d’un dieu unique, le dieu Râ (dieu soleil). Il fait d’Akhetaton sa capitale (Tell el-Amarna), et changea son propre nom qui devint Akhnaton. Ce pharaon était surtout préoccupé de politique intérieure, et il négligeait les conquêtes passées qui avaient été faites en Syrie et en Palestine. Ces contrées étaient alors menacées par les puissants Hittites.

Les tablettes de Tell el-Armana furent découvertes en 1887. Elles sont écrites en cunéiforme et sont de langue babylonienne (le babylonien était devenu la longue diplomatique, et cela montre l’influence grandissante de Babylone à cette époque).

Ces tablettes représentent la correspondance entre les princes et les chefs palestiniens, syriens (et autres) avec Aménophis IV (Akhnaton) et aussi avec son père Aménophis III. Ces lettres sont d’un grand intérêt puisqu’elles nous renseignent sur les conditions de vie en Palestine à l’époque de la conquête de Canaan par les Hébreux (environ 1400 ans av. J.-C.). Dans ces lettres, les vassaux cananéens d’Aménophis IV implorent l’aide du pharaon d’Égypte contre des envahisseurs qu’ils appellent Habirus. Cette aide ne fut pas accordée. Il est raisonnable de penser que ces Habirus sont bien les Hébreux qui conquirent le pays de Canaan.

Les plaies d’Égypte

La Bible nous dit expressément que c’est dans la ville de Tsoan (Tanis) que Moïse rencontra le pharaon pour lui intimer de libérer les Hébreux (voir Ps. 78.12, 43). La Septante, traduction en grec de la Bible hébraïque, rapporte que Tsoan était connue sous le nom de Tanis par les Grecs. C’était une ville d’Égypte importante, et ce sont les pharaons de la 19e dynastie qui s’attachèrent à en faire la plus belle ville d’Égypte. Certains égyptologues (Brugsch) pensent que Tsoan devint la ville du pharaon seulement à partir de Ramsès II, qui améliora les fortifications. Cependant, ce n’est pas là l’avis de tous les savants (Naville).

Aujourd’hui encore on peut voir les ruines de Tsoan. Ces ruines attestent de la splendeur de la ville égyptienne. Tsoan était encore la demeure des pharaons au temps d’Ésaïe (Ésa. 19.11). Ézéchiel prophétise sa destruction (Ézé. 30.4). En effet, la ville n’est aujourd’hui qu’un tas de ruines. Ses innombrables petites maisons ne sont plus qu’un immense monceau de décombres qui s’étend sur un très grand espace de terrain.

Comme nous l’avons déjà constaté, le pharaon d’Égypte était considéré comme un dieu. Un chant adressé au pharaon Méneptah se trouve dans le papyrus Anastasi :

« Au roi santé, vie, force ! Ceci est pour informer le roi dans la salle royale de celui qui aime la vérité, le grand ciel où est le soleil. Prête-moi ton attention, ô soleil qui te lèves pour illuminer la terre avec ta bonté ; l’orbe solaire des hommes, chassant les ténèbres de l’Égypte. Tu es comme l’image de ton père le soleil, qui se lève dans les cieux. Tes rayons pénètrent jusqu’au fond des cavernes. Il n’y a point de lieu où ne se fasse sentir ta bonté. Tes paroles sont la loi de toute la terre. Quand tu reposes dans ton palais, tu entends la voix de toute la terre. Tu as des millions d’oreilles. Ton œil est plus brillant que les étoiles du firmament, il peut fixer le disque du soleil. Si la bouche dit un mot dans une caverne, il monte jusqu’à tes oreilles. Tout ce qui est fait en secret, ton œil le voit, ô Baenra Meriamen, Seigneur, miséricordieux, qui donne la respiration. » (Papyrus Anastasi ; trad. M. Chabs « Mélanges égyptologiques, 1870, p. 117)

Après un tel éloge, on comprend la réaction du pharaon en Ex. 5.1, 2 : « Qui est l’Éternel, pour que j’obéisse à sa voix… ? »

Autrefois, les incrédules niaient quelques-unes des plaies en les prétendant incroyables ou impossibles. Aujourd’hui, les rationalistes admettent les plaies, mais les réduisent à des phénomènes naturels. Ils pensent que les textes qui nous rapportent les plaies ont un fond véridique, mais qu’ils sont caractérisés par des « exagérations poétiques ». Ce qu’ils ne peuvent pas expliquer rationnellement est mis au rang d’« exagérations poétiques », c’est tout. Ce changement dans la façon de voir des sceptiques est dû aux découvertes archéologiques et historiques qui ont été faites récemment sur l’Égypte. On peut constater que nombre de fléaux décrits dans l’Exode étaient familiers aux Égyptiens. Ces fléaux pour sûr sont miraculeux, mais ils sont souvent des phénomènes naturels en eux-mêmes, amplifiés pour la circonstance et provoqués par Dieu au moment voulu :

« Il n’en subsiste pas moins d’ailleurs une différence essentielle entre les plaies dont nous parle l’Exode et celles dont l’Égypte a souffert en d’autres temps. Ce qui distingue les premières des secondes, en leur donnant un caractère miraculeux, évident et incontestable, c’est qu’elles arrivent à point nommé, comme sanction de la Parole de Dieu, dans des circonstances annoncées à l’avance, précises, et avec une intensité qui révèle manifestement une intervention surnaturelle : elles se produisent par l’ordre de Moïse, au moment qu’il a prédit, de la manière qu’il a déclaré ; elles cessent quand il l’ordonne et, plusieurs fois, au moment qui lui a été fixé par le pharaon… les Égyptiens n’en contestent jamais le caractère extraordinaire ; ils en sont, au contraire, consternés et ils acceptent ces signes comme une preuve de la mission divine de Moïse. »14 F. Vigouroux « La Bible et les Découvertes Modernes » éd. Berche et Tralin – Paris Tome II,, p. 262.

« Sans doute, si on considère – les prodiges opérés par Moïse – uniquement en eux-mêmes, et chacun pris séparément, en faisant abstraction de ces circonstances, telle que la manière dont ils furent opérés et la fin à laquelle ils rapportaient, ils pourront ne paraître que des effets purement naturels ; mais si, au contraire, on a égard à ces circonstances, comme on le doit dans l’examen de tout fait historique, il en sera bien autrement. » (M. l’abbé Glaire « Livres saints vengé », 1re éd., tome I, p. 345)

« En effet, à qui paraîtra-t-il naturel que des fléaux si nombreux et si terribles qui n’ont aucun rapport entre eux, fondent à la fois sur un pays, et cela dans l’espace de cinq ou six semaines, et que les seuls Israélites, réunis dans la petite terre de Gosen, en soient exempts ? Comment, par des moyens naturels, Moïse aurait-il pu prévoir, prédire, produire tous ces fléaux – en élevant ou en abaissant sa verge – les prolonger à son gré, puis les faire cesser d’un seul mot ? Ces miracles avaient une fin vraiment digne de Dieu ; ils étaient nécessaires pour que Moïse, obtenant de Pharaon la liberté des Hébreux, les formât en corps de nation, leur donnât des lois justes et leur enseignât le culte du vrai Dieu ; c’est cette délivrance des Israélites, c’est leur sortie d’Égypte qui fraya au genre humain la route du Christianisme ; et le dessein de Dieu de racheter le genre humain, dessein annoncé dès la chute de nos premiers parents, dont on doit voir la confirmation et même un commencement d’exécution dans l’événement qui constitua les Hébreux en corps de peuple, fut enfin accompli par la venue du Messie. »15Janssens, « Introduction à l’Ecriture Sainte » N° 12.

Dieu a choisi d’utiliser les fléaux connus et redoutés des Égyptiens. Ces fléaux correspondent aux conditions réelles dans la vallée du Nil et constituent une preuve de la véracité historique du récit.

Ces plaies sont caractérisées par un côté surnaturel. Il est aisé d’interpréter les eaux changées en sang comme un phénomène naturel, mais lorsqu’on va dans le détail du récit, une interprétation purement naturelle ne concorde pas avec le récit. Par exemple, ce n’est pas dans le Delta du Nil qu’on observe le phénomène des eaux qui se teintent en début de crue. Cette teinture rouge provient des lacs abyssins et de l’un des affluents du Nil qui rejoint le Nil au-dessus de Sennar, à Fozojla. Ce n’est pas dans le Delta, où se trouvait Tsoan, qu’on peut observer ce phénomène, mais dans le haut cours du Nil. Cette teinte du Nil se produit généralement au moment de l’inondation du Nil, vers le 15 juillet. Or, cette plaie, d’après la chronologie approximative que nous donne la Bible, aurait eu lieu en février.

Un chercheur du siècle dernier visita cette région, et voici ce qu’il écrivit à propos de cette teinture du Nil couleur rouge : « Il n’y a point-là de mélange nuisible, comme au temps du Nil vert : l’eau n’est jamais plus saine, plus délicieuse, plus rafraîchissante que pendant l’inondation. »16Osburn, « The Monumental History of Egypt », – London, 1855, tome I – p. 10-12, trad. M. Maspero, Histoire « Ancienne des peoples de l’Orient » p. 3-4.

La Bible décrit l’eau changée en sang comme ayant des effets malfaisants, alors que le phénomène naturel, auquel il est parfois fait allusion pour expliquer ce miracle, n’a que des qualités bienfaisantes. Selon la Bible cette eau était si mauvaise que tous les poissons périrent.

À propos de la première plaie, nous pouvons constater que l’auteur du livre de l’Exode, Moïse, avait une connaissance très exacte du pays. Cela se voit notamment en Exode 7.19. Les mots, que l’on trouve dans ce verset et qui décrivent le fleuve, ont un sens très précis et qui correspond à la réalité des lieux.

  • naharot : ce mot désigne le bras du fleuve.
  • ye amim’ : ce mot désigne les canaux (c’est le mot égyptien)
  • agammim : ce mot désigne la région des étangs
  • kol miquêh maim : ce mot désigne tous les autres amas d’eau laissés par le Nil : mares, bourbiers, etc. Voir l’étude du Dr H. Kurtz qui met en relief les différences qui existent entre le phénomène naturel du Nil Rouge et la 1re plaie d’Égypte.17H. Kurtz « Geschichte des Alten Bundez » tome II – p. 101, 102.

Si la première plaie d’Égypte n’avait été que le phénomène naturel du Nil Rouge, elle n’aurait jamais suscité le moindre étonnement, car c’était un phénomène auquel on s’attendait comme au retour du débordement du Nil.

Dans la plaie des grenouilles, le mot « grenouille » a aussi le sens de crapaud en hébreu. Les grenouilles sont très abondantes en Égypte, surtout au moment des crues. Les Égyptiens adoraient la déesse Hek, qui devait normalement les délivrer de ces animaux malfaisants qu’étaient les grenouilles.

Dans la Bible d’Allioli (tome I, p. 289), nous trouvons une bonne remarque sur le caractère surnaturel de ce phénomène :

« Lorsque le Nil a pris son accroissement, et surtout après que ses eaux se sont retirées, les grenouilles naissent en grand nombre dans les étangs et les endroits marécageux que, peu à peu, elles abandonnent. Mais la plaie des grenouilles, dont Moïse frappa l’Égypte, arriva au mois de mars (ou de février) avant même que les eaux du fleuve commencent à s’enfler, et elle eut cela d’extraordinaire et de miraculeux, que ces animaux parurent subitement, en quantité prodigieuse, et contre leur instinct naturel, elles se répandirent par terre, pénétrèrent dans les appartements et, enfin qu’elles périrent comme elles avaient paru, d’une manière subite et dans le même temps que Pharaon avait fixé. »

Les kinnim envahirent ensuite l’Égypte et sont une sorte de moustique. Ces moustiques apparaissent surtout vers la fin de l’inondation. Ce fléau est décrit comme un miracle, car il se produisit au moment même où Aaron frappa la poussière de son bâton. Les magiciens ne purent d’ailleurs contrefaire ce miracle.

Le mot arôb, qui est traduit « mouche » dans la plaie suivante, est un mot vague. On peut englober dans ce mot toutes sortes de mouches, sans distinction de l’espèce. Des mouches envahissent l’Égypte après la retraite des eaux du Nil, vers septembre ou octobre. Or ce fléau eut lieu au commencement de mars. Ce fléau fut si terrible que Pharaon commença à proposer de concessions à Moïse. Cette plaie apparaît miraculeuse du fait de la distinction qui est faite entre les Hébreux et les Égyptiens (Ex. 8.19).

Ces épidémies faisaient parfois des ravages parmi les troupeaux, mais notez ici la distinction entre les troupeaux des Hébreux et des Égyptiens (Ex. 9.6). Les ulcères, la grêle, les sauterelles n’étaient pas non plus inconnus des Égyptiens, mais ils présentent aussi des caractères surnaturels dans le récit biblique.

La conquête de Canaan

Le pays de Canaan était habité par les Cananéens (Jos. 11.3). Les Cananéens étaient disséminés à travers tout le pays (Juges 1.9, 10). Le mot « Palestine » est une désignation géographique plus tardive dérivée du mot « Philistin » (Peleste) – nom d’un peuple qui s’établit le long de la côte méditerranéenne au 12e siècle av. J.-C. La Palestine était le pont entre deux grandes civilisations : celle de l’Égypte et celle de la Mésopotamie.

Lorsque les Israélites héritèrent du pays de Canaan, Dieu leur commanda de préserver la pureté de la religion de l’Éternel (Ex. 19.5-7). Si Israël n’obéissait pas à cette injonction, lui aussi serait jeté hors du pays, comme l’avait été Canaan (voir Gen. 15.16 ; Jos. 6.17, 21, Jug. 2.1-3 ; etc.). On trouve le récit de la conquête de Canaan en Jos. 1–12. Les territoires furent ensuite accordés aux différentes tribus (Jos. 13–22).

Pour une évaluation de la date de la conquête de Canaan, voyez le chapitre précédent sur la date de l’exode. Si l’on accepte l’historicité des documents bibliques, la date de l’exode peut être fixée aux environs de 1441 av. J.-C. et la date de la conquête de Canaan aux environs de 1401 av. J.-C. (début de la conquête) – (voir Juges 11.26& 1 Rois 6.1).

Une courte étude de la civilisation cananéenne à l’époque de la conquête illustrera amplement les assertions bibliques comme quoi Dieu châtiait ces peuples pour leur corruption morale et religieuse. Certains critiques estiment que les récits bibliques de la conquête de Canaan et l’intervention divine à cet égard sont contraires à la révélation que nous trouvons dans la personne du Christ. Certains ont même été jusqu’à dire que ces récits de l’Ancien Testament « déshonorent Dieu » (Rowley : « Relevance of the Bible » p. 32sv).

Toutefois, l’archéologie illustre amplement le fait que les Cananéens étaient un peuple totalement corrompu, ainsi que la Bible l’affirme. En tout cas, on peut établir que la Bible nous donne une image juste de ce qui se passait à cette époque.

Autrefois les exemples archéologiques et historiques sur la civilisation cananéenne étaient très minimes. Les seules sources d’information étaient la Bible et certains auteurs du monde gréco-romain. Philon de Byblos, érudit d’origine phénicienne (100 av. J.-C.), écrivit une histoire phénicienne (Phoinikika). Eusèbe ainsi que d’autres auteurs considéraient que Philon avait traduit les œuvres très anciennes d’un certain Sanckuniathon qui aurait vécu 700 av. J.-C. Pendant longtemps le témoignage de Philon et les allusions qu’y fit Eusèbe furent considérés par la plupart des érudits comme de la pure invention. Cependant, on a maintenant la preuve de l’authenticité du contenu de ces anciens écrits. Cette preuve se trouve dans les textes trouvés à Ras Shamra, sur la côte syrienne (1929-1937 ; C. F. A. Scheffer). Les mythes et les divinités que décrit Philon étaient liés à une très grande décadence morale. On retrouve cela dans les textes de Ras Shamra qui décrivent aussi la religion et les mœurs des Cananéens. La mythologie cananéenne demeura la même entre 1400 et 700 ans av. J.-C. De nombreux écrits furent trouvés à Ougarit près de deux temples dédiés, l’un à Baal, l’autre à Dagon (15e et 14e siècle av. J.-C.).

On sait maintenant que parmi toutes les divinités cananéennes El était la plus importante. Le nom de ce dieu vient d’un mot qui veut dire « fort, puissant ». C’est pour cette raison que ce nom est parfois employé dans la Bible pour décrire la puissance de Dieu.

Le dieu cananéen El était un dieu dévoué à encourager le vice et la corruption. Selon Philon, El avait trois femmes qui étaient aussi ses sœurs. Philon décrit ce dieu comme un tyran sanguinaire, qui terrifiait les autres dieux, qui détrôna son propre père, Uranus, et assassina son fils et sa fille. Les poèmes d’Ougarit témoignent de sa corruption dans le domaine sexuel.18Albright : « Archeology and the Religion of Israël » p. 73. Malgré tout, les Cananéens pensaient que El était le plus grand dieu, et ils l’appelaient « le père des années » (abu shanima) et « le père de l’homme » (abu adami). El était aussi le dieu qui avait engendré tous les autres dieux. Comme Zeus, il était le dieu des hommes et des dieux.

Baal était le fils de El. Il dominait sur tous les autres dieux et il était parfois appelé le « dieu des cieux » (Baal Shamem). Il provoquait la pluie et l’orage. Les textes de Ras Shamra le représentent tenant un éclair à la main. Il donne la pluie à l’homme et permet la fertilité et la reproduction. Ougarit mentionne Anat, sœur et femme de Baal. Plus tard, au 9e siècle, la femme de Baal fut appelée Astarté (1 Rois 18.19). Le mot « Baal » avait le sens premier de « Seigneur ; maître ». Son nom fut aussi employé pour désigner d’autres dieux antiques.

Anat, épouse et sœur de Baal, était l’une des trois plus grandes déesses cananéennes. Les deux autres sont Astarté et Ashéra. Elles étaient les déesses du sexe et de la guerre. Pour les Cananéens, Anat était la plus grande des « prostituées sacrées », mais ils l’appelaient parfois « la vierge » et même « la Sainte » (Qudshu) ! On rendait un culte à la prostitution à travers cette déesse et ses représentantes sur terre (des prêtresses) qui, elles aussi, étaient des prostituées. On trouve cela aussi bien chez les Cananéens que chez les Syriens, les Phéniciens et plus tard, les Grecs. Ce genre de prostitution existait aussi chez les hommes qui rendaient ainsi hommage à Anat. La Bible les appelle « sodomites » (1 Rois 14.24 ; 15.12 ; 22.47 ; cf. Deut. 23.18 ; Os. 4.14). Anat exultait à se vautrer dans le sang des hommes vaincus à la guerre (Gordon : « Ugaritic Literature » II : 11.2-40 p. 17f).

Acherath (ou Ashéra) est une autre déesse que la Bible mentionne et qui apparaît aux côtés de Baal. Cette déesse était vraisemblablement représentée par une statuette en bois (1 Rois 15.13 ; 2 Rois 21.7). Elle avait même des prophètes (1 Rois 18.19).

La religion cananéenne était un polythéisme d’un genre très corrompu et perverti. Il était inévitable que ces peuples ressemblassent aux dieux qu’ils adoraient. Cette corruption était telle que Dieu choisit de l’éliminer. C’est ainsi que le pays « vomit » ses habitants (Lév. 18.25). Les Israélites étaient divinement avertis de ne pas eux-mêmes se pervertir au point d’être « vomis » par le pays (Lév. 20.22).

D’un point de vue théologique, il n’y a aucune base solide pour mettre en doute le caractère de Dieu tel qu’il est présenté dans les Écritures, du fait du châtiment qui retomba sur les Cananéens à cause de leur corruption. De même on ne peut, avec justesse, condamner le comportement des Israélites dans leur obéissance à Dieu qui les désigna pour être l’instrument de ce châtiment. Étant l’instrument de la justice de Dieu, ils voyaient d’autant mieux les conséquences d’une telle dégradation morale et religieuse, et cela serait, pour eux, un avertissement de ne pas tomber aussi bas.

C’est une erreur de croire que Dieu dans sa Sainteté parfaite est moins opposé au péché dans le Nouveau Testament que dans l’Ancien. Cette notion vient de ce qu’on a minimisé l’importance de la notion de sainteté chez Dieu et la justice qui en résulte. La gravité du péché est d’autant plus évidente dans le Nouveau Testament, et cela dans la crucifixion de Jésus-Christ. Bien sûr, de nos jours, le sens de la crucifixion a aussi été tordu au profit de la philosophie actuelle.

La miséricorde divine apparaît d’une façon suprême dans le Nouveau Testament, et si cela n’était pas, la notion que Dieu est plus miséricordieux dans le Nouveau Testament que dans l’Ancien n’existerait pas. La miséricorde de Dieu est maintes et maintes fois affirmée et démontrée dans l’Ancien Testament. Plusieurs exemples nous montrent que Dieu châtiait les hommes quand ils avaient « comblé la mesure » de leur iniquité (Gen. 15.16 ; Gen. 6 ; Gen. 19).

« Je suis vivant ! dit le Seigneur, l’Éternel, ce que je désire, ce n’est pas que le méchant meure, c’est qu’il change de conduite et qu’il vive. Revenez, revenez de votre mauvaise voie ; et pourquoi mourriez-vous, maison d’Israël ? » (Ézéchiel 33.11)

Dans le cas des Cananéens les Israélites devaient être conscients du fait qu’ils n’étaient pas des « justiciers », mais les instruments du seul juge, Dieu (Jos. 6.13, 14). Si Dieu avait permis que la religion cananéenne subsistât, aurait-il pu accomplir son projet de sauver l’humanité ? Son culte n’aurait-il pas été abandonné au profit des idoles ? Son nom n’aurait-il pas finalement été oublié ? Ne pouvant imposer Sa volonté, n’aurait-elle pas été finalement dédaignée ? Nous croyons que Dieu avait des raisons justes de châtier les Cananéens. C’est grâce à l’activité et l’intervention constante de Dieu que le monde a pu être préservé de la décadence absolue. La religion humaine n’aurait pas évolué, ainsi que les mœurs humaines. Au contraire, l’humanité aurait dégénéré. Tout progrès dans le domaine spirituel ou moral, on le doit uniquement à une révélation ou à une intervention divine.

Israël et les Assyriens

En 745 av. J.-C. Tiglath Piléser III devint roi d’Assyrie. C’était approximativement au moment de la mort de Jéroboam II, roi d’Israël (régna env. 783-743 av. J.-C.), et de l’assassinat de son fils, Zacharie, qui régna 6 mois en Samarie. Schallum remplaça Zacharie et régna pendant un mois ; puis, Menahem fit tuer Schallum et prit le pouvoir de la 39e année du règne d’Ozias, roi de Juda (2 Rois 15.8-15). C’est sous le règne de Menahem que Tiglath Piléser III (aussi connu sous le nom de « Pul ») vint en Israël, et Menahem lui versa un tribut et devint son vassal (2 Rois 15.19).

L’Assyrie avait perdu de sa puissance, et c’est Tiglath Piléser qui la lui redonna. À Babylone, qu’il avait aussi subjugué, Tiglath Piléser était appelé « Pul » (employé dans la Bible). Les annales assyriennes, écrites par Tiglath Piléser, décrivent la subjugation de Menahem et mentionnent le fait qu’il paya un tribut au roi d’Assyrie.19M. F. Unger, « Archeology and the Old Testament » p. 254. Ces mêmes annales mentionnent que Retsin, roi de Syrie, paya lui aussi un tribut au roi d’Assyrie (op. cit. p. 255). C’est ce Retsin, roi de Syrie, qui, quelques années plus tard, forma une coalition avec le roi d’Israël, Pékach, contre Juda (Ésa. 7 ; 2 Rois 15.37). Le prophète Ésaïe vint avertir Achaz, roi de Juda, qu’il n’y avait aucun danger que Juda soit détruite par cette coalition Retsin/Pékach (Ésa. 7). Malgré cette promesse du prophète, Achaz n’eut pas confiance en Dieu, et il forma une alliance avec l’Assyrie afin de se protéger de la coalition Pékach/Retsin. Les deux rois Pékach et Retsin assiégèrent Jérusalem, mais ne purent s’en emparer ; cependant, ils emmenèrent de nombreux prisonniers de Juda. Le prophète Obed obtint la libération de ces prisonniers. Achaz obtient l’intervention de Pul, et en 733-732, celui-ci s’empara de Damas et subjugua la Syrie. Probablement à la même époque, il envahit aussi une grande partie d’Israël et emmena des captifs (2 Rois 15.28-31 ; 16.7sv).

Le dernier roi d’Israël, Osée, qui succéda à Pékach, devint roi la 12e année de règne d’Achaz, roi de Juda (2 R. 17.1). Le tribut que paya Achaz à Pul (2 R. 16.7, 8) est aussi mentionné sur une inscription assyrienne de l’époque (M. F. Unger « Archeology and the Old Testament » p. 256). Pul se targue lui-même dans les annales assyriennes d’avoir pris de nombreux captifs dans ses nombreuses campagnes militaires (op.cit. p. 257). Un document assyrien qui a été perdu mais qui fut traduit par H. Rawlinson raconte la mort de Retsin, roi de Syrie.

Tiglath Piléser, après sa conquête de la Syrie, envahit aussi Israël. Il plaça lui-même un roi sur le trône d’Israël, Osée (dernier roi d’Israël : 732-724 av. J.-C.). Les documents assyriens mentionnent qu’Osée paya aussi un tribut à Pul. (Voir Luckenbill « Ancient Records of Assyria and Babylonia » Vol. I sec. 801.)

Salmanasar V (2 R. 17., 4), roi d’Assyrie, monta contre Osée, qui se soumit à lui et lui versa un tribut. Plus tard, Osée fit appel au roi d’Égypte pour l’aider et, en conséquence, il fut jeté en prison par le roi assyrien. Le roi d’Assyrie envahit ensuite tout le pays et vint mettre le siège devant Samarie. La ville résista pendant trois ans. Elle fut finalement prise par le fils de Salmanasar, Sargon II, en 722 (721) av. J.-C. Les Israélites furent déportés à Halah sur le Habor et chez les Mèdes. Le roi d’Assyrie fit venir des gens de Babylone, de Cutha, Avva, Hamath et Sepharvaïm et les mit dans la ville de Samarie à la place des Israélites. Sargon II est mentionné en Ésaïe 20.1. Avant que l’archéologie révèle l’existence de ce roi, la Bible était seule à le mentionner, et, bien sûr, on parlait de « mythe ».

Ce fut en 1843 que le français Paul-Émile Botta découvrit le palais de Sargon. À présent, Sargon II est le roi assyrien sur lequel on possède le plus d’informations. Sargon mentionne lui-même, dans les annales assyriennes, qu’il prit Samarie et qu’il emmena des captifs (voir M. F. Unger « Archeology and the Old Testament » p. 260). L’Assyrie était arrivée, à cette époque, au sommet de sa puissance.

Juda et l’Assyrie. Sanchérib, fils de Sargon, accéda au trône (704-681 av. J.-C.). Ce roi est souvent mentionné dans la Bible du fait de ses rapports avec Juda. Ses propres récits, que l’on trouve dans les annales assyriennes, confirment les écrits bibliques. La capitale de l’Assyrie était Ninive, sur le Tigre (voir 2 Rois 19.36). Lorsque les Hébreux parlent de « Ninive, la grande ville », ils voulaient parler de Ninive même et des petites villes avoisinantes (Gen. 10.11, 12 ; Jon. 1.2 ; 3.2-4 ; 4.11). (Voir M. F. Unger « Archeology and the Old Testament » p. 263.) Aujourd’hui, on peut visiter les ruines de ce que fut jadis la capitale assyrienne.

Ézéchias, 12e roi de Juda, qui succéda à Achab (2 R. 18.1-20 ; Ésa. 36–37 ; 2 Chr. 29–32), connut aussi la menace assyrienne. Ézéchias désirait briser l’alliance que son père Achaz avait faite avec l’Assyrie (2 R. 16.7-9). Il entreprit une réforme religieuse assez importante et qui fut marquée par la célébration de la Pâque (2 Chr. 29.1–30.27). Les efforts d’Ézéchias furent couronnés de succès (2 R. 18.2 ; 2 Chr. 32.5-30).

Au début du règne d’Ézéchias, Salmanasar et Sargon II assiégèrent Samarie (2 R. 18.9-11). Le prophète Ésaïe annonçait que l’Assyrie allait conquérir l’Égypte et qu’il était inutile pour Juda et son roi de chercher un appui chez les Égyptiens (Ésa. 20.2-6).

Sanchérib écrivit lui-même dans les annales assyriennes qu’il subjugua Merodac Baladan, roi de Babylone. (Unger « Archeology and the Old Testament »). C’est ce Merodac Baladan que mentionne Ésaïe et qui fit des hommages à Ézéchias, lequel en retour lui montra les trésors du temple (Ésa. 49.1-8).

Ézéchias se rebella contre Sanchérib et, en 701 av. J.-C., le roi assyrien se mit en route pour assiéger Jérusalem. Cette campagne de Sanchérib est mentionnée dans les annales personnelles de Sanchérib. Ces annales se trouvent au British Museum. Le récit assyrien et le récit biblique s’accordent en décrivant cet événement (2 R. 18.13 ; 19.37 ; 2 Chr. 32.1-12 ; Ésa. 36.1 ; 37.38). Tharthan, Rab Saris et Rabschaké ne sont pas des noms propres, mais des grades militaires (2 R. 18.17). Tharthan avait le grade le plus haut après le roi, dans l’armée.20Millar Burrows, What mean these Stones, New Haven, 1941, pp. 43ff. Dans les annales assyriennes, Sanchérib dit de lui-même avoir reçu 30 talents d’or d’Ézéchias (2 Rois 18.14). Cependant, les annales assyriennes mentionnent aussi un tribut de 800 talents d’argent, alors que la Bible mentionne 300 talents d’argent. Peut-être s’agit-il d’un tribut différent dans les deux récits. Il est aussi possible que cette différence vient de ce que le récit biblique mentionne ce tribut en talents palestiniens, plus lourds, alors que les annales assyriennes parlent de talents babyloniens, plus légers.21Bernard Eberhard Schrader, selon G. L. Robinson, The Bearing of Archeology on the Old Testament, New York, 1941, p. 100.

Les récits personnels de Sanchérib montrent (sans qu’il y ait pour cela d’explication) qu’il ne prit pas la ville de Jérusalem. Il mentionne le siège de Jérusalem et le tribut qu’Ézéchias devait finalement lui verser, mais il ne mentionne pas avoir pris la ville (une telle omission de la part de ce roi assyrien suffit à prouver qu’il ne réussit pas à prendre Jérusalem ainsi qu’il l’escomptait). Or, la Bible affirme que son armée fut disséminée par Dieu (2 R. 19.35 ; Ésa. 37.36). Sanchérib écrivit dans ses annales : « Je l’enfermai dans Jérusalem, sa capitale, comme un oiseau dans sa cage » (cité par W. Keller « La Bible arrachée aux sables », p. 228)… mais il ne dit pas avoir « capturé cet oiseau ».

La Bible relate la mort de Sanchérib tué par ses propres fils (Ésa. 37.38 ; 2 R. 19.37). Dans une inscription assyrienne Assarhaddon, successeur de Sanchérib, mentionne le meurtre de Sanchérib par ses fils (M. F. Unger, Archeology and the Old Testament, p. 270). D’ailleurs, un peu plus tard, le roi d’Assyrie, Assurbanipal, mentionne, lui aussi, le même meurtre de Sanchérib (op. cit. p. 270).

Babylone et la chute de Jérusalem

Après la mort d’Assurbanipal en 633 av. J.-C. l’empire assyrien commença à décliner. En 612, Ninive tomba sous la coalition des Mèdes, des Babyloniens et des Scythes. Ce qui restait de l’armée assyrienne se réfugia à Charan. Le pharaon d’Égypte, Néco, vint au secours de l’armée assyrienne : « De son temps, pharaon Néco, roi d’Égypte, monta (contre/auprès de) le roi d’Assyrie, vers le fleuve de l’Euphrate » (2 Rois 23.29 ; en hébreu al traduit « contre » ; dans certaines traductions al peut aussi être traduit « près de » ou « auprès de »).

Josias, roi de Juda, n’aimait guère les Assyriens et voulut s’opposer à ce secours de l’Égypte. Il vint à Megiddo pour tenter d’arrêter le pharaon Néco. C’est là que Josias fut tué et que son armée fut vaincue. Néco fut lui-même vaincu à Carkemisch en 605 av. J.-C. lorsqu’il rencontra le roi de Babylone Nebucadnetsar. À la bataille de Carkemisch, l’empire d’Assyrie s’écroula définitivement et l’Égypte subit une importante défaite. La ville de Carkemisch fut détruite par Nebucadnetsar. On peut voir les ruines de Carkemisch aujourd’hui.

Josias mourut en 609 av. J.-C. Le pharaon mit Joachaz, fils de Josias sur le trône de Juda, et il régna trois mois (2 Rois 23.33). Il fut emmené captif en Égypte où il mourut (2 R. 23.34). Le pharaon Néco mit Éliakim (Jojakim) sur le trône de Juda. Jojakim paya un tribut au pharaon (2 Rois 23.35).

Lorsque Nebucadnetsar eut conquis tous ses adversaires, Jojakim se soumit à lui pendant trois ans (2 R. 24.1). Les rois de Juda devaient rester assujettis à Babylone jusqu’à la captivité. Jojakim se révolta contre le roi de Babylone, au bout de trois ans, mais sans succès (2 R. 24.2sv). Après la mort de Jojakim (598), Jojakin, son fils lui succéda. Il régna trois mois et fut déporté à Babylone où il fut prisonnier pendant 37 ans. C’est Évil Merodac qui le libéra (2 R. 25.27-30). Les annales babyloniennes mentionnent la captivité de Jojakin à Babylone (M. F. Unger « Archeology and the Old Testament » ; W. F. Albright : « King Jehoiachin in Exile », in the Biblical Archeologist, 1942 – p. 49f).

Pendant les 40 dernières années du royaume de Juda, Jérémie prêcha désespérément la repentance du peuple et annonça le jugement à venir et la captivité du peuple. Malgré ces avertissements le peuple continue de plus belle dans ses idolâtries.

Après avoir détrôné Jojakim et l’avoir emmené captif, Nebucadnetsar mit un nouveau roi sur le trône de Juda : Sédécias (2 Rois 24.17). Sédécias était donc un vassal de Nebucadnetsar. Il chercha aussi à se faire appuyer par l’Égypte. Jérémie l’avertit, sans succès, de l’inutilité de tels efforts (Jér. 37). Finalement, Sédécias se rebella contre Nebucadnetsar. Celui-ci s’avança avec son armée contre Jérusalem. Jérémie prophétisa de la fin imminente de Jérusalem (Jér. 37.17sv.). Nebucadnetsar assiégea Jérusalem et la ville fut prise en 587 (586) av. J.-C. (cf. 2 R. 25.1 ; Jér. 32.24). Sédécias tenta de s’échapper, mais il fut capturé et emmené devant le roi (Jér. 39.5-7). Sédécias vit mourir ses deux fils et ses yeux furent crevés. Il fut emmené captif à Babylone où il fut emprisonné (2 R. 25.1-7 ; Jér. 52.11). Jérusalem fut détruite (2 Rois 24.17 – 25.10).

Des documents découverts à Lakis et datant de 589 av. J.-C. nomment des villes de Juda assiégées par Nebucadnetsar avant la prise de Jérusalem. Une de ces villes était Lakis (voir Jér. 34.7). Une des lettres de Lakis mentionne aussi la venue des Égyptiens au secours de Juda (Unger : « Archeology and the Old Testament » p. 285-286). Les lettres découvertes à Lakis illustrent d’une façon surprenante les prophéties de Jérémie.

Les manuscrits de la mer Morte

Les manuscrits de la mer Morte furent découverts en 1947 dans des grottes sur le site de Qumran se trouvant aujourd’hui aux abords de la mer Morte dans le parc national de Qumran géré par l’État d’Israël. Ces manuscrits constituent l’une des plus grandes découvertes archéologiques de tous les temps. Répartis dans une douzaine de grottes, les 970 manuscrits mis au jour ont été copiés entre le IIIe siècle avant J.-C. et le Ier siècle de notre ère. La majorité des documents est rédigée en hébreu, une autre partie est en araméen et le reste en grec. Le Grand Rouleau d’Ésaïe constitue la découverte majeure de cet ensemble de manuscrits. Il comporte dix-sept feuillets de cuir cousus ensemble et mesure 7,34 mètres de long. On y trouve l’intégralité des soixante-six chapitres du livre du prophète Ésaïe.

Le Grand Rouleau d’ÉsaïeUne grotte de Qumran

Conclusion

L’archéologie biblique nous rappelle que Dieu parle aux hommes dans la Bible à travers l’histoire. Les paroles de Dieu sont données à des êtres de chair et de sang et qui vivent dans un contexte particulier. Grâce à l’archéologie biblique, les récits de l’Ancien et Nouveau Testaments prennent une signification nouvelle et vivante. Le texte biblique nous éclaire sur le mode de vie, les habitudes, la topographie de certaines régions antiques du Proche Orient. Confronté aux découvertes archéologiques – tessons de poterie, vestiges de fondations de palais, anciens manuscrits – le texte biblique se dévoile dans toute sa véracité et toute sa force.


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